La Zumba… Quossé ça ?

Par Nathalie Bellerose-Hamel – Non, mais sérieusement, ça avait vraiment l’air cool… de loin… Les femmes dansent, se trémoussent pis ça l’air ben fluide, ben facile. Moi, je fais des cours de powerbar tsé, pis j’tripe ben raide… Ce jour–là, j’ai eu la brillante idée de m’inscrire au cours de Zumba, histoire de faire un peu de cardio… Awaye, la Nath, on va faire bouger ça s’te p’tit cul là ! (Cette phrase-là est bonne pour mon estime donc je la glisse subtilement entre deux verbes… Chut !)

J’arrive dans le local, je scrute les horizons… Qui est la prof ? Cherche, plisse les yeux, secoue mes jambes, histoire de me préparer, pis je la voie rentrer dans salle en courant. Ça y’est, elle m’énerve déjà… Elle est ben trop énervée ciboire, elle gesticule comme si elle s’était tapée deux-trois lignes d’poudre magique dans les toilettes en bas…

« Lets-go gang, on va s’amuser à soirrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr » dit-elle en criant haut et fort avec sa voix nasillarde…

Nasillarde… Ça ne me surprend même pas qu’elle porte ce timbre de voix. Visage pointu, nez pointu, lèvres pointues, cheveux pointus, coudes pointus, seins pointus. Tout est pointu. Je me demande quel est son nom… Elle doit s’appeler Stéphanie… Me semble que les Stéphanie y’ont des p’tites voix portantes et fatigantes…

Désolé pour les Steph qui lisent ce jugement… Que Dieu me pardonne. Amen.

Fak, a commence, toé chose…

Bref coup d’œil dans le miroir… Criss, j’ai ben de grosses cuisses… Bah ! Ça doit être la glace qui fait cet effet-là… Bref coup d’œil sur les cuisses de la fille en avant de moi en oblique… Asti…

Ça doit être mes verres de contact qui fait cet effet-là… Ça me rassure… Je me crois…

Presque.

Bref, on commence le cours… La musique dans le tapis, pis awaye, on s’donne à fond !

La prof part à gauche, je pars à gauche pis le groupe part à droite.

Ben voyons ! Vous ne savez pas votre gauche pis votre droite ? Si la prof part à sa gauche, vous faite pas le contraire, vous partez à gauche ciboire… Elle est en face de nous ! Ça ne prend pas la tête à Papineau pour comprendre ça !

D’ailleurs, c’est qui Papineau ?

Bref. Mon raisonnement est nul. Personne n’écoute ma pensée pis tout le long du cours j’suis la fille dans le fond à droite qui va jamais dans le même sens que les autres. Un beau p’tit mouton noir, ou rose, si je me fie à mon p’tit kit acheté au WalMart…

Juste le temps de finir d’exécuter mon 360 degré, je me rends compte que tout le monde est déjà rendu trois mouvements plus loin dans la chorégraphie…

Voyons, gang de sauterelles sur le speed, calmez-vous les nerfs…

Pas possible. La prof en avant est stiff (ça existe-tu ce mot-là ?) comme un paquet de muscles pas bouffable… Tsé le genre de mottons caoutchouteux dans ta tranche de steak qui te pogne entre les dents sans crier gare… Elle est ben trop tendue, on dirait que les os vont y sortir des articulations… Je chiale-là, mais le pire c’est qu’elle, elle l’a l’affaire…

Elle exécute tous ses mouvements à la perfection. Elle semble cool, pis je me rends compte qu’entre moi pis un chien qui marche pour la première fois avec des bottines (ha ! ha ! Je vous somme d’aller voir ça sur YouTube…) y’a pas ben, ben de différences…

Criss, ça y’a pas tenté à ma mère de m’inscrire à des cours de danse quand j’étais plus jeune ? Ben non, c’est vrai, j’étais une p’tite intello artiste qui avait soit le nez plongé dans les bouquins soit les deux mains dans la peinture à l’huile en train de créer une belle œuvre d’art sur la douillette de maman…

Fak, ça donne ce que ça donne. Moi.

Ha ! Ha ! Des chiens qui marchent pour la première fois avec des souliers… Je la ris encore…

Je me regarde dans le miroir. Joualvert. Quand je rentre mes fesses par en dedans, elles se transforment en deux géantes pelures d’orange… Quossé ça… Faut je change de pantalon…

Tchiiii !! (Bruit de chat qui puishh). Miroir, éloigne-toi de moi.

La prof change de musique. Ben oui, de la salsa. Elle se déhanche les hanches comme une vraie de vraie alors que moi j’essaye de calculer l’angle des miennes qui prend soudainement des dimensions bizarres à 45 degrés en parallèle avec mon genou. C’est supposé tourner un bassin ? Moi, en tout cas, y carre bien. Carre. Mouvement carré… Vous avez pigé ? Chu droite comme une barre, asti. J’ai d’l’air d’une marionnette en bois qui fend l’air de son body trop carré.

Je regarde la porte. Je m’enfuis-tu ? Hum, on est juste à la première chanson… Le monde va penser que je suis trop essoufflée pis que je me sauve comme une chochotte… J’ai de la fierté quand même… OK, je rectifie… Un ego qui prend sa place, mettons…

M’a restée. Oh ! Le temps de songer à tout ça en me dandinant d’un pied à l’autre comme si je retenais une envie de pisser trop urgente, le groupe a changé de place… Bon ça y’est… C’est qui la nowhere qui était loin dans sa bulle pis qui est encore dans coin dans le fond de la salle ?

C’est moi !!!!

Je m’en vais en sautillant prendre une autre place. Je regarde la porte encore… Si je me rapproche subtilement au rythme des mouvements, je vais peut-être pouvoir filer incognito…

Comme si la prof lisait dans mes pensées et qu’elle n’acceptait pas que quelqu’un quitte son cours, elle crie haut et fort :

–On retourne à sa place !

Zut. J’étais si près du but. Y’a rien de pire que le sentiment de ne plus avoir d’espoir.

J’hais ça. Je me dis haut et fort que j’hais la Zumba. Coup de grâce. Tout le monde pirouette partout, lève les genoux dans tous les sens, virevolte leur bras en haut de leur tête avec grâce, pis moi je piétine de gauche à drette en rêvant de mon cours de Powerbar… Powerbar, t’as mal dans les os après ça pis tu chies ta vie. Pis c’est hot. Au moins, j’ai l’impression que j’ai dérouillé mon corps. Ici, à part n’être jamais dans la même track que tout le monde, je me sens comme la dernière guenille dans le fond d’une armoire trop grande. Je sers à rien pis je ne servirai jamais à rien.

Bon, là je le fais. Je criss mon camp d’icitte.

– Ben non, Nath, tu n’es pas venue ici pour rien… N’abandonne pas.

–Ta gueule conscience, moi je pars. Je suis un être libre.

–Nath…

–OK.

Je reste pis je soupire. J’ai une montée de volonté. OK, là je me force. Redresse-toi les épaules, pis concentre-toi. Et voilà. Elle part la Nath ! Hop ! Un coup de jambe là, pis hop, un p’tit squat ici. Finalement, je ne suis pas si pire…

Jusqu’à tant que je me regarde dans le miroir.

Satan, éloigne-toi de moi !

Avez-vous déjà vu une tortue aux pattes cassées qui fait du surf ? Voilà. Moi j’en ai vu une. C’était moi. Fuck la Zumba.

Je regarde l’heure.

10 minutes. Il reste 10 minutes au cours ! Come on Nath, té capable !

Une seconde de motivation me traverse à nouveau le corps. Une seconde seulement, car l’autre d’après l’idée d’écrire un article sur mon expérience de Zumba s’incruste dans ma tête. Mécanisme de défense qui m’accompagne depuis toute petite, Fuite prend la relève ! Voilà. L’artiste écrivaine part en voyage ; un aller simple vers l’imagination. Dans la salle, ne reste que mon enveloppe corporelle qui danse un pied sur l’autre comme un nerd dans un bar qui tient sa bière pis qui n’est pas à l’aise du tout. Le dos ben drette pis les p’tits pieds qui se mêlent dans les craques du plancher. Je m’envole et m’enfuis dans l’univers des mots que je suis en train d’écrire présentement. Pendant que mon esprit s’amuse comme une folle, mon corps lui tel un robot continu d’essayer de faire comme les autres. Je butine ici et là sur les idées qui dansent avec une fougue et un professionnalisme désarmant dans mon cerveau complètement déconnecté du groupe. La danse des mots, ça j’assure ! Je zumbaote cet intellect-là !

19 h 30 tapant. Heure de la fin du cours. Elle met une dernière musique… C’est pour nous faire plaisir qu’elle dit en esquissant un sourire trop pointu.

What ? Veux-tu ma mort ?

La porte, je l’enligne pis je la prends sans hésiter…

Vite, j’ai un article à écrire.

(En fait, j’avais plus hâte de sauter dans les bras de mon chum pis de l’embrasser parce qu’il m’attendait en bas des marches… Mais ça, on ne le dit pas.)

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Author: maryberluecie

Blogue d'une famille loufoque, amusante, attachante et divertissante, situé dans les Bois-Francs.

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